Emil Zatopek : « la locomotive tchèque » - Série n°2
Emil Zatopek de Tchécoslovaquie qui a remporté trois médailles d'or dans les épreuves d'athlétisme longue distance lors des Jeux olympiques d'été à Helsinki, en Finlande, vers août 1952
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Un nom qui claque comme le bruit des battements de pieds sur le bitume. Un trajet de vie qui nous transporte dans la dureté des habitants des pays de l’Est sous domination idéologique de l’ogre soviétique. Une histoire sportive nourrit de solitude et de solidarité. Zatopek, Zatopek, Zatopek comme un écho de l’olympiade 1952, où il pénètre le panthéon des légendes olympiques. Emil Zatopek, c’est plus qu’un athlète, c’est à lui seul : un terrain de toutes les facettes d’une vie remplie de tristesse et de bonheur.
Quand en 2006, sort un magazine de course à pied basé en Belgique portant comme titre Zatopek, c’est une façon d’associer un nom et une discipline. Le Tchèque Emil Zatopek (1922-2000) est l’un des athlètes les plus célèbres dans le monde pour ses succès et son style de course très distinctif, « torturé » diront certains observateurs.
De la fin des années 1940 au milieu des années 1950, celui qu’on surnommait « la locomotive tchèque » pour sa faculté à maintenir un train de course extrêmement régulier domine les courses de grandes distances (invaincu entre 1948 et 1954). Il est le premier athlète à avoir remporté les courses de 5.000 mètres, 10.000 mètres et le marathon dans une même édition (Jeux Olympiques d’Helsinki, 1952).
Finale de course haletante du 5.000 m aux Jeux Olympiques 1952, à Helsinki. Le trio de tête constitué du Tchécoslovaque Emil Zatopek, du Français Alain Mimoun (1921-2013) et de l’Allemand Herbert Schade, font de cette course l’une des plus spectaculaires de l’histoire des Jeux Olympiques.
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Finale de course du 10.000 m aux Jeux Olympiques 1952, à Helsinki. Le Tchécoslovaque Emil Zatopek s'impose triomphalement face à ces adversaires, le Français Alain Mimoun (1921-2013) et le Britannique Gordon Pirie.
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Issu d’une famille modeste, le sport et en particulier l’athlétisme, lui permet de construire un fabuleux destin. A l’âge de 18 ans, c’est en tant qu’employé dans une usine de chaussures Bata qu’il effectue ses premières performances. Une course populaire organisée à l’intention des apprentis, qu’il termine deuxième, lui donne l’occasion de faire ses véritables débuts dans l’univers de l’athlétisme. L’armée lui permet de poursuivre sa carrière sportive.
Les Jeux Olympiques deviennent pour Zatopek, la terre d’exploits uniques dans l’histoire du sport. La postérité retiendra l’incroyable course du marathon des J.O d’Helsinki 1952. Sous une chaleur accablante le natif de Kopřivnice livre une leçon de courage. L’Anglais Jim Peters, grand favori, imposa une cadence incroyable pour déconcentrer le néophyte Zatopek (c’était son premier marathon). La suite est légendaire. Contentons-nous de la fin. Avant le trente-cinquième kilomètre, il dégage son maillot et le remonte sur la poitrine pour se donner un peu de fraicheur. Quand il apparait sur la piste après avoir plaisanté avec les spectateurs dans les derniers kilomètres, ce fut du délire. Franchissant, la ligne d’arrivée en battant l’ancien record olympique de plus de 6’, il tombe dans les bras de Dana, sa compagne, elle-même devenue championne olympique du lancer de javelot avec 50,47. La victoire le transforme en héros national.
Paire de pointes d’Emil Zatopek utilisées à l’époque des Jeux Olympiques d’Helsinki en 1952.
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Quelques années après, il devient un « banni ». Son parti-pris pour les dirigeants du Printemps de Prague lui vaut un sort peu enviable après l’entrée des troupes soviétiques en Tchécoslovaquie, en 1968. Il est contraint de travailler pendant six ans dans différents métiers manuels qui bousillent sa santé, notamment dans les mines d’uranium de Jáchymov. Oublié, il retrouve ensuite un statut digne grâce à ses admirateurs et à la fraternité des athlètes dont le Français Alain Mimoun, son éternel rival.
« Emil, mon ami, c’était un homme ordinaire qui a eu une vie extraordinaire » nous confia, Alain Mimoun.
Zatopek est félicité par Mimoun après la victoire du Tchèque à l'épreuve du 5.000 m lors des JO d'Helsinki 1952
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Pour en savoir plus
- Youtube. « Comment Emile Zatopek a couru la course du siècle ? »
- Youtube : « Le triple exploit fou d’Emil Zatopek à Helsinki »
- Yohanne Fortune : « Emil Zatopek dans la Guerre froide : de la soumission à la rébellion (1948-1968) dans Sciences Sociales et Sport, 2012/1 n°5, pp.53-86.
- Jean echenoz : Courir, Paris, Minuit, 2008