Le « Forgeron de Grisolles » et le 1er Tour de France

Focus sur les collections sportives du Musée Calbet

Groupe de cyclistes avec Jean Dargassies (à droite de l'enfant) © Musée Calbet

Les liens entre le village de Grisolles et le Tour de France s’établissent dès les origines. Alors qu’il faut créer le parcours qu’emprunteront les cyclistes à travers la France pour la toute première fois, il est décidé que les coureurs, lors de la 4ème étape reliant Toulouse à Bordeaux, traverseront le Tarn-et-Garonne et notamment Grisolles. Cela tombe bien puisque l’un des enfants du pays, Jean Dargassies fait partie des inscrits à la compétition.

Né à Grisolles le 15 juillet 1872, il est forgeron de profession, tout comme son père. Si Jean Dargassies a marqué les esprits par sa robustesse, sa grande moustache blonde, son accent à faire rouler les « R » et sa bonhomie, il s’en est fallu de peu qu’il soit absent de cette aventure. La légende veut en effet qu’il n’ait été mis au courant de l’existence du Tour de France que par l’homme qui lui avait vendu son vélo et qui lui avait alors suggéré de participer à cette compétition. Lorsqu’il se présente à Paris avant le début de la course, Jean Dargassies annonce aux journaliste sportif Géo Lefèvre que n’ayant pas lu L’Auto (l'ancêtre de L'Equipe) et bien qu’inscrit pour la compétition, il souhaite avoir des renseignements sur le déroulement de la course. Il n’a en effet jamais fait de compétition auparavant et se lance dans cette aventure à 31 ans sans équipier ni soutien. Il s’est toutefois entrainé pendant des mois à Grisolles, pédalant derrière la moto du vétérinaire de la ville, Pierre Cazassus.

Jean Dargassies se place sur le départ le 1er juillet 1903 sur son vélo Gladiator de 14 kg à pignon fixe. Il arrive toujours dans les 15 premiers et à l’arrivée à Paris finit 11ème au classement général. Rendu très populaire par Géo Lefèvre qui relate ses exploits dans L’Auto, il aura été particulièrement encouragé lors de la 4ème étape traversant sa ville natale. Après avoir terminé 2ème lors de la course Bordeaux-Paris en mai 1904, Jean Dargassies se représente la même année pour un deuxième Tour de France, souhaitant être le premier à signer sur la feuille du départ dans l’espoir que cela lui porte chance. Pour la deuxième fois, il est très acclamé et lorsqu’il passe en tête à Grisolles tout le monde l’applaudit. La légende veut que les autres coureurs l’aient laissé passer en tête afin de se protéger d’éventuelles représailles de ses supporters. Arrivé tout d’abord 9ème du classement général de ce deuxième Tour de France, il sera finalement classé 4ème après la disqualification des premiers coureurs reconnus coupables de tricheries. Dargassies se présente à nouveau sur le départ en 1905 mais abandonne à la première étape, puis en 1907 où il ne se présentera pas au départ de la 5ème étape. Cette année-là, il avait été recruté avec Gauban pour accompagner Pépin de Gontaud sur la route du Tour contre une rémunération importante. Alors que ce dernier abandonne, Dargassies fait de même et rentre à Grisolles où il décide d’ouvrir un magasin de cycles. Il mourra dans sa ville natale le 7 aout 1965, mais sa popularité est toujours telle qu’une école porte son nom à Eaune.

Son magasin de cycle ayant été repris ensuite par Gino Damo, donateur du Musée Calbet, la plupart des objets relatifs au vélo dans les collections du musée (en particulier une grande collection de plaques de marque de bicyclette) proviennent de ce magasin. Il reste aussi dans les archives plusieurs photographies et coupures de presse qui relatent cette histoire locale pittoresque.
 

Jean Dargassis s'entrainant avec Pierre Cazassus

Jean Dargassis s'entrainant avec Pierre Cazassus